La responsabilité des moteurs de recherche face aux « fake news »

Nous avons consacré dans cette lettre plusieurs articles aux « fake news » qui ont infesté le Web depuis plusieurs mois. Mais il est bon de se demander quelle est la responsabilité juridique des moteurs de recherche dans leur transmission. Et, au-delà de ces considérations, de se poser la question d’un pouvoir que pourraient acquérir ces acteurs à définir ce qui est bon et ce qui est mauvais, s’approchant ainsi d’une possibile dictature du savoir et des opinions…

Par Alexandre Diehl

 

La campagne des élections présidentielles aux Etats-Unis a été l’occasion de grandes vagues de « fakes news » où chaque camp répandait des informations fausses, incomplètes ou encore sorties de leur contexte (voir notre article du mois dernier à ce sujet). Le caractère amplificateur des réseaux sociaux et le fait que les deux candidats principaux utilisaient des technologies big data pour adapter leur message électoral en fonction des tweets et messages Facebook des électeurs, ont mis en lumière ces dérives. C’est dans ce cadre que les grands opérateurs, à commencer par Google, Facebook ou Twitter, ont décidé (certes, sous une forte influence politique) de mettre en place des mesures de lutte contre ces fausses informations. Ce souhait se heurte pourtant à une réalité juridique… promue par ces mêmes acteurs.

Les promesses de lutte contre les fake news

Cible de nombreuses « fake news », le clan Clinton a obtenu assez rapidement de la part des grands acteurs (Google, Facebook, Twitter, etc) la mise en place de mesures contre leur développement. Ainsi, Google et Facebook (dont le business model repose notamment sur une très puissante régie publicitaire) ont annoncé couper les revenus publicitaires aux « faux » sites d’information.

Cette décision pouvait comprendre, dans l’exemple de Google, l’interdiction aux sites visés, de participer au programme AdSense qui permet de recevoir une rémunération en tant que support de publicité Google : « Nous allons commencer à interdire les publicités sur les contenus trompeurs, de la même manière que nous interdisons les publicités mensongères », a expliqué Google dans un communiqué à l’Agence France-Presse du 15 novembre 2016. Pourtant, Google n’a pas modifié sa politique sur le programme AdSense ni les Conditions Générales de celui-ci qui ne fait que « combattre les sites illicites ». En d’autres termes, seuls les sites dont le contenu est « illicite » pouvaient (et peuvent) être concernés par cette mesure. En outre, aux termes du « Règlement du Programme AdSense » qui a valeur contractuelle, « les éditeurs ne sont pas autorisés à insérer du code AdSense sur des pages dont le contenu n’est pas conforme à nos consignes en la matière. Il peut s’agir, par exemple, d’un contenu réservé aux adultes, ou incluant des incitations à la violence ou au racisme. Pour en savoir plus, consultez notre article relatif au contenu interdit ». On peut toutefois regretter que le « contenu interdit » visé par ce Règlement ne contienne rien sur les « fake news » spécifiquement, et parle juste des contenus « illicites »…

Facebook avait promis, exactement au même moment, de mettre également en place des mesures concrètes de lutte contre ce fléau. Les mêmes envolées en conférence de presse ont conduit à la même absence de changements juridiques et contractuels : aucune modification des Conditions Générales de Facebook sur ce sujet n’est à signaler au oment où ces lignes étaient écrites.

Le principal impact de ces déclarations et de cet axe de communication est que ces acteurs ont fait croire au monde entier, à commencer par les politiques, qu’ils allaient réellement lutter contre les « fake news ». Il est d’évidence que ces acteurs ont été pris de court au moment de l’élection présidentielle aux US (et probablement un peu avant avec le Brexit) et qu’ils ont réagi, c’est-à-dire qu’ils ont dit ce que les journalistes (et sûrement les politiques) attendaient qu’ils disent.

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Avocat à la cour, cabinet Lawint (http://www.lawint.com/)

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