Rémi Bacha (OVH) : « Notre défi SEO : le développement à l’international »

À mon arrivée, les sites OVH disposaient déjà d'un volume conséquent de contenus et la notoriété du groupe était déjà impressionnante. Les webmasters se chargeaient d'activer quelques leviers de référencement naturel, principalement techniques. Pour autant, chacun avait sa propre vision de l'optimisation pour les moteurs de recherches, parfois quelques idées reçues.

Mon premier challenge fut donc de contribuer à cette stratégie globale de référencement et de transmettre les bonnes guidelines SEO à l'échelle de l'entreprise, tout en tenant compte des spécificités locales de chacun de nos pays d'implantation.

Il était nécessaire de faire comprendre les bases du SEO et de créer de nouvelles habitudes auprès de tous les collaborateurs d'OVH pour créer un effet de levier. Ma stratégie a donc d'abord été d'évangéliser le SEO grâce à des formations organisées en France et dans nos filiales en Europe, en Amérique du Nord et en Afrique. Aujourd'hui encore, la formation interne est très importante chez OVH ; elle permet de donner du sens aux actions menées collectivement.

Une fois cette étape franchie, nous avons lancé une phase d'outillage pour pouvoir montrer la valeur des actions SEO sur tous nos sites, en y déployant des outils d'analytics, de webperfs, de suivi de ranking, de netlinking, de crawl, etc.

Avec une charge de travail grandissante, nous avons vite ouvert un autre poste de SEO occupé par David Looses depuis 2014. Nous avons alors pu traiter davantage de projets, et mettre l'accent sur l'international en mettant en place des méthodes de travail pour développer vers les filiales la portée des actions réalisées en France. Nous avons la chance de pouvoir nous appuyer sur des relais locaux dans la plupart de nos pays d'implantation et nous mettons un point d'honneur à adapter localement les stratégies réalisées en France, et pas seulement les traduire. L'inverse est également vrai puisqu'il nous arrive aussi très souvent de travailler pour une filiale en particulier et d'en tirer des opportunités pour la France.

Nous sommes également passés par une phase de mise à flot des sites vis-à-vis des guidelines Google : nous appelons cela la « qualité SEO ». Au programme : passage au mobile, déploiement du HTTPS sur l'intégralité des sites du groupe sans perte de trafic, amélioration des webperfs, travail du maillage interne, chasse au duplicate content, déploiement du hreflang et du Schema.org, mise à jour des htaccess, etc.

Pour continuer à délivrer nos projets SEO tout en assurant les actions de qualité SEO, nous avons été rejoints par Guillaume Bot et Maëva Brunelles, qui ont intégré OVH respectivement en 2015 et 2016. C'est à ce moment que je suis devenu responsable de l'équipe.

Nous nous intéressons depuis plusieurs années au web sémantique et plus généralement aux nouvelles tendances de recherches, comme la recherche vocale et les assistants personnels. Chacun de nos projets est pensé en tenant compte de ces technologies ; nous avons également fait de la R&D autour de Humming Bird et plus récemment de Rankbrain, comme nous le présentions à l'OVH Summit avec Vincent Terrasi (https://www.youtube.com/watch?v=5iDBW3F_cYM).

Le partage des connaissances est d'ailleurs l'une des valeurs du groupe OVH : depuis 2014, j'ai eu l'occasion de donner 11 conférences lors d'évènements internes (OVH Summit, OVH World Tour), mais aussi externes (Que du web, SEO Campus, SEO Camp…).

Je suis très fier de ce que délivre mon équipe au quotidien. Le travail abattu par une équipe de cette taille est réellement impressionnant ; nous recherchons d'ailleurs deux nouveaux talents SEO pour continuer à nous ouvrir à de nouveaux projets.

Faites-vous tout le travail en interne ou sous-traitez-vous certaines parties ?

Le travail a toujours été internalisé pour le SEO – SEA, mais avec la croissance du groupe (nouveaux produits, nouvelles marques, ouvertures de centres de données), nous pouvons envisager un accompagnement sur certaines actions.

Quels outils utilisez-vous ? Développés en interne ? Produits du marché ?

Nous utilisons AT Internet, AWR Cloud, Oncrawl, Majestic, SEMrush, Ranxplorer et Visiblis et 1.fr pour les plus connus.

Depuis cette année, nous intégrons Dataiku dans notre boîte à outils pour le traitement de données comme j'en parlais sur mon blog. (https://remibacha.com/analyse-logs-ovh-dataiku/)

L'innovation est ancrée dans l'ADN d'OVH. La croissance du groupe étant très rapide et demandant une certaine agilité, nous créons régulièrement de nouveaux outils nous-mêmes, principalement en R et Python, pour répondre à des besoins spécifiques. Dernièrement, nous avons travaillé sur un outil basé sur le machine learning pour connaître les facteurs de ranking sur une thématique en particulier. 

Quelles sont les spécificités du SEO pour une entreprise comme OVH ? 
Quels sont vos objectifs ?

OVH grandit de façon exponentielle et notre principal défi est d'accompagner son développement à l'international. Nous avons par exemple travaillé en parallèle sur le lancement de site OVH dans plusieurs pays en même temps, une migration de toutes les plateformes de guides vers une seule, des campagnes SEA et la préparation du changement de marque d'OVH prévu pour 2018. L'agilité, la gestion de projet et la priorisation apparaissent comme des indispensables.

Avec les dizaines de nouveaux collaborateurs qui nous rejoignent chaque mois, notre autre défi est d'améliorer constamment le niveau de connaissance SEO. La formation interne régulière au SEO et la communication de nos actions restent donc aussi des axes très cruciaux pour nous.

Quels sont les principaux obstacles que tu rencontres au quotidien ?

Quand je suis arrivé en contrat pro sur le premier poste dédié au SEO chez OVH en 2012, le groupe performait sur le Web depuis 12 ans ; le principal challenge a été de trouver ma place et démontrer la valeur de mes recommandations.

Le challenge d'aujourd'hui est d'aller chercher des talents dans un environnement en constante évolution. Avec l'expansion du groupe, la production de contenus ou encore la synchronisation de nos filiales pour le lancement de campagnes SEA constituent des points cruciaux dans notre stratégie ; voilà pourquoi nous continuons à faire grandir notre équipe.

Comment vois-tu l'avenir du SEO dans les années qui viennent ?

Je pense qu'une partie des professionnels du SEO piochera dans les techniques de Data Science pour tirer parti de toute la donnée disponible (API, outils, scrappers, etc.) et améliorer la prise de décision. L'objectif étant de réduire la part d'inconnu dans les stratégies SEO pour tendre vers le Graal : le SEO 100 % « data driven ». On peut citer la prédiction grâce au machine learning, les analyses sémantiques basées sur des techniques de natural language processing (NLP), ou encore l'analyse de logs grâce au process mining.

On voit également de plus en plus d'outils SEO utiliser des techniques de machine learning et de deep learning pour apporter des recommandations fines sur une thématique ou une intention de recherche précise. À mon sens, cette tendance fait directement écho aux changements de fond dans le fonctionnement de Google : la volonté de l'entreprise de s'appuyer sur des briques de l'intelligence artificielle, jusqu'à tendre vers l'« AI first ». Avec Rankbrain, Google confie une partie de sa mécanique de classement des résultats à une intelligence artificielle et cela remet en question le connu, notamment tout ce que nous savions sur les facteurs de classement.

Avec une IA qui, j'imagine, va prendre de plus en plus de place dans les prochaines années, il me semble impératif de mettre à jour la façon dont nous pensons et traitons le SEO. Chez OVH, nous avons créé le métier de data scientist SEO, dont l'une des missions est justement de faire du reverse engineering des SERP pour connaître nos propres facteurs de ranking.

Quels sont tes objectifs et projets pour 2018 (au niveau personnel 
et professionnel) ?

Pour suivre les ambitions de croissance du groupe OVH, nous nous formons à la programmation pour automatiser le plus d'actions possible en créant nos propres outils. Nous apprenons aussi la data science que nous utilisons pour étudier les données à notre disposition, afin de maximiser nos chances de réussites. Mon objectif pour 2018 est de mettre la data dans toutes les actions SEO.

De mon côté, je vais continuer à développer des compétences en data science (R, Python, machine learning et text mining) et me mettre sérieusement au big data (spark, map reduce). Je travaille actuellement sur l'écriture d'un livre avec Vincent Terrasi : « La Data Science dans le SEO » qui paraitra en 2018. Vous pouvez suivre le projet ici : https://remibacha.com/livre-seo/

Merci Rémi, pour tes réponses à nos questions.