Le 25 Avril dernier, les équipes de l’agence SeoMix ont lancé une nouvelle extension SEO baptisée SEOKey. Mais de quoi parle-t-on exactement ? Dans cet article, nous allons vous bien entendu présenter brièvement ce plugin. Mais ce qui est intéressant, c’est avant tout son histoire, ses développements, ses choix et les premiers retours des utilisateurs. En somme, un véritable cas d’école de développement d’un produit sur un marché concurrentiel et en pleine croissance.
SEOKey, c'est quoi ?
Avant d’entrer dans le détail de son histoire ou de ses problématiques, présentons d’abord l’outil. SEOKey est une extension d’audit, d’accompagnement et d’optimisation du référencement naturel pour le CMS WordPress. L’objectif est simple : améliorer la visibilité d'un site web en corrigeant automatiquement un maximum d’éléments, et en guidant l’utilisateur sur le reste.
SEOKey pourrait paraître à la base similaire aux autres extensions WordPress existantes : elle apporte les fonctionnalités nécessaires à un bon référencement naturel. On y retrouvera donc les classiques gestions des balises Title et meta description, la génération des fichiers Sitemaps XML, la gestion du noindex ou encore des balises canonical. Mais tout cela est juste une étape indispensable pour tout référenceur.
Le cœur de SEOKey est avant tout son module d’audit global, qui analyse tous les contenus et les différents aspects de WordPress, le tout en un clic et au même endroit.
Le module d’audit de SEOKEY
Le second module important de SEOKey permet de mettre en place des optimisations automatiques sur différents aspects de WordPress : les flux RSS, la réécriture des balise meta, le système de Ping interne, etc. Cela a d’ailleurs fait l’objet de nombreuses discussions et de choix dont nous parlerons un peu plus loin.
Les optimisations automatiques de l’extension
Enfin, nous y avons ajouté une interface plus simple, couplée avec des outils SEO pratique : la gestion des 404 de Google, le suivi des redirections automatiques de WordPress ou encore le ALT Editor.
Un ALT editor permet d'éditer en masse les textes alternatifs de la bibliothèque de médias
Pour ceux que cela intéresse, le site officiel détaille toutes ces fonctionnalités à cette adresse : https://www.seo-key.fr/
Vous pouvez aussi consulter le webinaire de lancement qui vous permettra d’avoir une démonstration live de chaque fonctionnalité et aspect : https://www.youtube.com/watch?v=IlogLBXVnP8
Mais venons-en au cœur du sujet de cet article : pourquoi avoir voulu créer une extension alors que d’autres existaient déjà ? Quels ont été les choix et les difficultés lors du développement ? Et surtout, quels enseignements peut-on tirer en termes de développement produit ?
Un marché WordPress en croissance
Aujourd’hui, la part de marché mondiale de WordPress est ultra dominante, avec presque 43% des sites web l’utilisant dans le monde (source https://w3techs.com/technologies/overview/content_management). C’est loin devant ses concurrents principaux Shopify (4,3%) et Wix (2,3%), ou encore devant ses concurrents historiques Joomla (1,6%) et Drupal (1,2%). Et cette croissance est presque constante depuis sa création en 2001 (sauf depuis début 2022 avec une légère baisse de parts de marché).
Depuis des années, de vraies opportunités sont devenues possibles pour les entreprises, avec notamment la vente :
- De création de site et de refonte ;
- De développement sur mesure ;
- De formation ;
- D’audit et de conseil ;
- De ventes de produits.
Et dans ce dernier domaine, de nombreuses extensions payantes existent pour répondre à des besoins multiples :
- Temps de chargement ;
- Sécurité ;
- E-commerce ;
- Constructeurs de pages (builders) ;
- Formulaires ;
- Et dans notre cas de figure, le référencement naturel (SEO).
Un marché SEO concurrentiel sur ce CMS
Il existe ainsi de nombreuses extensions gratuites et payantes dédiées au SEO. Si on les classe par parts de marché, nous avons ainsi :
- Yoast, le leader du marché, avec plus de 5 millions d’installations actives uniquement en version gratuite ;
- All In One SEO (qui avait longtemps été le leader avant d’être détrôné par Yoast) ;
- RankMath ;
- SEOPress ;
- The SEO Framework ;
- Boldgrid SEO ;
- Squirrly SEO ;
- Etc.
Et il en existe des dizaines d’autres. Le marché est donc concurrentiel, et la difficulté est alors de prouver aux utilisateurs sa plus-value par rapport aux autres, pour les convaincre de tester un autre outil.
Pourquoi avoir créé SEOKey ?
Cela nous amène à une question simple : pourquoi créer une nouvelle extension s’il en existe déjà des dizaines ?
A vrai dire, comme pour d’autres extensions WordPress, nous avons voulu créer SEOKey avant tout pour nous-mêmes. Quand on a l’habitude d’utiliser un outil, on en voit facilement les défauts et les manques. Pire encore quand on doit y faire appel à longueur de journée sur des dizaines de sites différents. On refait souvent les mêmes actions et mêmes paramétrages, et on se heurte aux mêmes manques.
Et surtout, quand c’est notre propre métier, on peut se rendre plus facilement compte du gouffre existant entre ce qui est nécessaire et ce qui est disponible. Un grand nombre d’extensions WordPress ont d’ailleurs ce vilain défaut (et nous ne parlons pas uniquement de celles sur le référencement naturel) : elles sont trop souvent créées par des développeurs WordPress dont ce n’est pas le cœur de métier.
Cela peut vite se ressentir avec une interface technique, ou alors dans une approche non adaptée au cœur de métier initial. Il est alors fréquent de voir des utilisateurs qui ne savent pas correctement utiliser certaines fonctions, ou qui se méprennent sur des termes de leurs outils.
L’objectif était donc simple : on voulait construire une extension de référencement naturel créée par et pour des référenceurs, tout en étant simple à utiliser.
Développer un produit nécessite une stratégie claire
Petit historique
Pour la petite histoire, l’idée de créer une extension et le nom SEOKey remonte à 2015-2016. Et pourtant, ce n’est qu’en 2021 que le développement a réellement démarré. Il y avait deux raisons à cela :
- Le manque de temps (ou plutôt le manque de volonté de se dégager du temps par rapport à l’agence SeoMix) ;
- Le besoin de définir ce que l’on voulait vraiment.
De quoi a-t-on besoin ?
C’est ce second point qui est intéressant. Si l’on demande à un référenceur ce dont il a besoin pour améliorer la visibilité d’un site, certains éléments vont revenir très rapidement :
- Balises Title ;
- Balises Meta Description ;
- Balises canonical ;
- Balise Meta Robots ;
- Fichiers Sitemaps XML ;
- Gestion des redirections ;
- Etc.
Mais sur d’autres points, c’est beaucoup plus complexe. Prenons en exemple les autres extensions SEO. Voici ce que l’on peut trouver dans ces dernières :
- La réécriture de l’URL de recherche (?s= sur WordPress) ;
- Les balises meta Dublin Core ;
- Une analyse de lisibilité du texte ;
- Intégration de Matomo et Google Analytics ;
- Les données de partage pour les réseaux sociaux (OpenGraph et Twitter Cards notamment) ;
- Etc.
En d’autres termes, on retrouve un peu de tout dans les extensions actuelles et parfois des fonctionnalités bien peu utiles pour le SEO.
Comment définir son produit ?
Quand on développe un produit, on peut utiliser deux méthodologies pour savoir ce que l’on va faire :
- En partant de l’existant et de sa concurrence ;
- En partant sur sa propre vision.
A vrai dire, nous avons fait les deux. Entre 2016 et début 2020, nous avions la première méthode : que font nos futurs concurrents ? Que font-ils de bien ? Quels sont leurs défauts ? Que doit-on ajouter ? Même si cela peut déjà vous aider à définir un produit, ce n’est PAS une bonne méthodologie, du moins si elle est utilisée seule.
On prend alors le risque d’entrer dans une stratégie de suiveur et de ne pas se différencier suffisamment. Un bon produit, c’est un produit qui a une vraie stratégie et qui répond à un besoin précis de ses clients. Un livre en parle d’ailleurs très bien, la stratégie Océan Bleu (https://fr.wikipedia.org/wiki/Stratégie_océan_bleu) qui explique comment aborder différemment un secteur d’activité pour réellement se différencier.
Stratégie Océan Bleu, un excellent livre pour se lancer sur un marché
Notre idée adonc été de se baser sur notre expérience avec les clients que l’on accompagne à l’agence. Les trois problématiques les plus courantes que l’on avait étaient simples :
- Le client ne sait pas ce qu’il doit faire ;
- Il doit faire appel à nos services pour des optimisations techniques ;
- Il a besoin d’être formé aux différents concepts du SEO et de WordPress.
Nous sommes donc partis de ce constat pour développer en priorité les modules dont nous avons parlé au début : l’audit et les conseils qui vont avec, les optimisations automatiques et une interface la plus simple possible (et encore, nous pouvons faire encore mieux).
Mais est-ce utile ?
Que doit-on développer ?
Une fois qu’une équipe produit a une stratégie et un axe de développement, elle va souvent lister tout ce que l’on doit développer. On aura alors une roadmap de travail avec la liste des tâches à terminer. Mais attention, c’est le meilleur moyen de ne pas réussir. Là encore, il y a plusieurs raisons à cela.
Tout d’abord, une liste trop longue de tâches va repousser indéfiniment le lancement final. Il faut donc faire des choix. Par exemple chez nous, nous avons délibérément sorti SEOKey sans version française ni l’import depuis l’extension Yoast. Il y a d’ailleurs une expression en marketing sur ce sujet : « Ship fast and iterate » (sortir rapidement son produit puis le faire évoluer). Attention par contre à ne pas faire n’importe quoi non plus : il faut toujours avoir un produit de qualité, même s’il est encore incomplet (ce qui, nous l'espérons, est le cas avec SEOKEY).
La seconde raison, c’est un aspect fonctionnel et utilisateur. Au lieu de traiter chaque tâche les unes après les autres, il ne faut pas aller trop vite. Pour chaque nouvelle fonctionnalité proposée, il faut se poser la question suivante : pourquoi dois-je l’intégrer dans mon produit ? Si vous n’avez pas de réponse positive franche, vous devez abandonner cette idée.
La dernière raison, c’est l’intérêt métier. Si l’on commercialise une extension SEO, il faut s’assurer que toutes nos fonctionnalités vont avoir un réel intérêt pour la visibilité. Là encore, pour chaque nouvel élément à intégrer, il faut se demander si oui ou non cela pourra réellement améliorer le référencement naturel. Si oui, on peut le conserver. Si non, il faut l’abandonner.
Nos choix
C’est pour ces raisons que certaines fonctionnalités concurrentes ne sont pas présentes :
- Les données de partages sociaux ;
- La possibilité d’avoir des redirections temporaires ;
- Un paramétrage de balises avec des %% ;
- Etc.
Chaque élément a fait l’objet de questions internes. C’est d’ailleurs le gros avantage d’être entouré d’experts SEO et qui sont aussi en relation client. On a donc pesé le pour et le contre à chaque fois avant de garder, de modifier ou de supprimer une idée.
Et bien entendu, comme pour n’importe quel produit, vous devez faire des choix ergonomiques : sous quelle forme va-t-on présenter chaque fonctionnalité ? Dois-t-on laisser le choix ou doit-on activer cette option ? Quelle est la meilleure façon de décrire cet élément ? Sur notre extension, on a ainsi eu le même parti que WordPress : « Decisions, not options ». En d’autres termes, on choisit pour l’utilisateur, réduisant ainsi le nombre d’options à paramétrer et à devoir activer. Là encore, nous avons eu les mêmes phases d’échanges :
- Est-ce utile ?
- Doit-on l’activer par défaut ?
- Peut-on désactiver l’option ?
- Comment expliquer ce concept ?
- Etc.
Le plus intéressant dans la démarche UX, c’est surtout de voir des avis parfois très convergeant, et parfois aux antipodes les uns des autres. C’est pour cette raison que nous avons mis en place des tests et réunions internes (entre référenceurs et développeurs), mais aussi avec des bêta-testeurs externes ayant des profils très différents les uns des autres, et donc avec des visions variées.
Les difficultés pour créer une extension WordPress
Au-delà de tous ces questionnements, des problématiques techniques sont apparues.
La première est légale. WordPress est un projet open source soumis à la licence GPLv2 : https://fr.wordpress.org/about/license/. En d’autres termes, tout code qui en dépend (extensions et thèmes) doivent avoir la même licence. Il est donc illégal de vendre du code WordPress. On doit alors vendre du temps (dans le cadre des prestations clients) ou du service. C’est ce que font toutes les extensions payantes WordPress : on achète un an de support et de mise à jour, et non pas le code en lui-même.
La seconde est la scalabilité. Il faut en effet :
- être capable de faire fonctionner son outil sur un petit site (une dizaines d’articles) comme sur un site de très grande taille ;
- avec des utilisateurs différents, chacun ayant des habitudes et paramétrages différents ;
- le tout multiplié par le nombre de thèmes et extensions qui existent sur le marché, en assurant un maximum de compatibilité.
Rien que sur ce dernier point, il existe actuellement plus de 59 000 extensions gratuites différentes, sans compter celles disponibles ailleurs, celles payantes ou encore les versions de toutes ces dernières.
Un grand catalogue d’extensions WordPress est disponible
Il faut donc tester, tester, et tester, puis corriger chaque cas particulier.
Depuis nos premiers bêta-tests internes puis externes, et désormais avec nos clients, la plupart des bugs sont rencontrés sur des sites spécifiques. Il est assez rare d’avoir un bug commun à plusieurs utilisateurs, ce qui complique donc la tâche pour le support et les développeurs en charge des correctifs.
C’est un point important à toujours garder en tête si l’un de vous souhaite un jour se lancer dans la création d’une extension ou d’un thème payant pour WordPress.
Entre doute, impatience et espoir
En plus des équipes internes de SeoMix pour les tests, la communication et la stratégie, plusieurs développeurs ont travaillé sur ce projet, notamment Julio Potier, Léo Fontin et Vincent Dubroeucq. Mais la majorité du code a été réalisé par moi-même, Daniel Roch.
Quand on a un projet à cœur depuis des années, c’est une pression importante :
- Le produit va-t-il plaire ?
- Va-t-on pouvoir gérer les demandes de support ?
- A-t-on fait des erreurs ?
- Va-t-on suffisamment se différencier ?
- Et la question la plus importante : va-t-on vraiment améliorer le SEO de nos clients ?
Et c’est là que les doutes et les espoirs se mélangent : sera-t-on à la hauteur le jour de la sortie ? Et rien n’a été plus frustrant que les fonctionnalités abandonnées en cours de route, ou refondues de A à Z car nous n’étions pas partis sur la bonne voie, techniquement.
L’avenir
Il nous reste beaucoup à faire. Nous avons une liste de fonctionnalités et d’améliorations que l’on veut apporter à SEOKey, et nous sommes dans la phase juste après le lancement où nous faisons justement le tri pour prioriser ce qui aura le plus d’impact pour la visibilité de n’importe quel site WordPress.
Comme beaucoup d’autres produits, nous avons mis en place une roadmap publique dans laquelle nous allons progressivement mettre à jour nos futures fonctionnalités : https://trello.com/b/jauwlc3J/seokey-pro-public-roadmap. C’est une pratique courant dans la vente de produits dématérialisée, comme ici avec Buffer : https://trello.com/b/PDIV7XW3/buffer-transparent-product-roadmap
La roadmap publique de Buffer
Nous changeons donc de rythme avec désormais une version majeure avec 2-3 fonctionnalités maximum à chaque fois, tout en itérant sur les retours des utilisateurs au fur et à mesure (remarques, idées d’amélioration, bugs, etc.). La première version majeure verra donc l’arrivée de la version française et de l'import depuis Yoast, et peut-être une petite surprise.
Et surtout, il faut qu’on lance réellement la communication car nous n’avons fait qu’effleurer la surface sur ce sujet.
Conclusion
SEOKey est, on l’espère, une vraie plus-value pour aborder plus facilement le référencement de WordPress : un audit global qui accompagne l’utilisateur, des optimisations automatiques et une interface plus simple.
Comme pour tout développement de produit, il a fallu se battre sur plusieurs aspects : définir une stratégie et un vrai positionnement produit, se dégager du temps et développer malgré des contraintes techniques complexes et nombreuses dans l’écosystème WordPress.
Mais les retours que l’on a depuis le lancement sont plus que positifs, avec par exemple ce dernier : « la simplicité d'utilisation globale de SEOKEY et l'efficacité résultant des analyses du module d'audit font de SEOKey un outil dangereusement addictif ».
Il ne nous reste donc plus qu’à concrétiser ce lancement : continuer le développement du produit, communiquer efficacement et améliorer le référencement des sites de nos clients.
Daniel Roch, consultant WordPress, Référencement et Webmarketing chez SeoMix (https://www.seomix.fr)